Des vignes dans les Cévennes : un peu d’histoire
Aujac est un petit village de la Cévenne gardoise près de Génolhac, lieu cher à Jean Pierre Chabrol, ce merveilleux conteur. Jusqu’à l’introduction du châtaignier, toutes les terrasses cévenoles étaient cultivées en vignes [Vitis Vinifera].
Après la Révolution de 1789, des pépiniéristes ont introduit des vignes américaines [Vitis Lambrusca, Riparia]. Ce sont celles-ci qui ont inoculé des maladies à tout le vignoble français dont le terrible phylloxera en 1870. Elles en étaient des porteurs sains. Le Cévenol, lui, s’est abstenu de greffer et les cépages américains résistants et très productifs sont restés hybrides. En 1934, on interdit ces cépages hybrides qui entraient en concurrence avec l’Aramon (300hl/ha) languedocien et les vins algériens. La supposée toxicité n’est venue s’ajouter que plus tard. En 1958, une ordonnance pénale oblige à l’arrachage de ces cépages.
Des cépages hybrides américains perdurent à Aujac
Malgré l’ordonnance pénale de 1958, des petits producteurs rebelles tentent aujourd’hui de valoriser et de pérenniser ce patrimoine végétal dans la haute vallée de la Cèze. Aux Coteaux d’Aujac, Gilbert Bischéri cultive le Clinton, l’Isabelle, l’Othello, le Jacquez, l’Herbemont, le Noah pour les hybrides producteurs directs interdits ; le Concord, leTaylor ,le Cunnigham , le Couderc noir 7120 pour les non autorisés et un vitis vinifera le Chatus.
Le mode de culture est exclusivement la treille ou la pergola. Ce mode de culture est adapté à la vigueur de ces variétés et à la possibilité d’utiliser le sol pour une culture secondaire, souvent la pomme de terre, car dans les Cévennes toutes les parcelles comptent. La résistance aux maladies de ces cépages permet de ne pas traiter donc c’est une culture biologique.
Les Coteaux d’Aujac
Gilbert Bischéri cultive et défend ses parcelles conservatoires. Mais pour en faire des vins de qualité, il a fallu recourir aux méthodes modernes. Ces cépages, de par leur acidité excessive, sont difficiles à vinifier : taille en vert, maturité poussée au maximum, vendange égrappée, maîtrise des températures, des densités et des acidités, élevage de 7 à 10 mois en fûts de chêne bordelais de 5 à 6 ans. Les raisins sont vinifiés ensemble. Seule la barrique est sulfitée.
Le résultat ? Des vins aux senteurs de lilas et aux arômes de framboise et de fraises des bois. Gilbert Bischéri milite pour la sauvegarde de ces cépages hybrides au sein de son association Fruits oubliés Réseau mais l’interdiction de 1934 demeure et ses vins ne sont pas à vendre, malheureusement. Ils sont réservés à la consommation familiale et associative.